Tic-tac sous le règne de Napoléon III
Samedi 22 avril 2023 à 07h
Cette semaine, Pierre nous questionne sur une pendule murale aux incrustations de nacre. L’occasion pour Philippe Rouillac, notre commissaire-priseur, de nous en dire plus sur l’histoire et la valeur de cet objet.
Le 19e siècle est une période faste pour l’horlogerie. Siècle des changements par excellence, aucune strate de la société ne résiste aux appels de la modernité galopante, et l’horlogerie ne fait pas exception. C’est en Suisse que des horlogers
comme Breguet ou Vacheron Constantin vont mettre au point des montres de plus en plus fines et légères, tout en
conservant une exactitude remarquable. L’Angleterre, l’Allemagne ou encore la France ne seront pas en reste, avec des artisans exceptionnels apportant chacun leur pierre à l’édifice. La révolution industrielle est également un facteur important
dans le développement de l’horlogerie, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, elle enrichit la bourgeoisie, qui peut désormais se permettre d’acheter des pièces d’horlogerie, augmentant de
ce fait grandement la demande de montres et pendules. Ensuite, l’extension du chemin de fer participe à l’amélioration des
chronomètres. Enfin, la révolution industrielle favorise la création de grands ateliers, rompant avec les productions plus intimistes du 18e siècle. Les États-Unis, jeune nation qui s’impose peu à peu comme la nouvelle puissance commerciale
mondiale, infligent au Vieux Continent une concurrence de production démentielle.
Une ère de prospérité s’ouvre en France, à partir de 1852, avec le règne de Louis-Napoléon Bonaparte sous le nom de Napoléon III. Le style du Second Empire est marqué par l’éclectisme des influences et des matériaux utilisés. Parmi eux, on peut noter un certain goût pour les bois noirs et noircis.
Une forme qui rappelle l’architecture de l’époque
L’objet de Pierre est ce qu’on appelle une pendule « oeil-de-boeuf », car la forme ronde du cadran rappelle les lucarnes architecturales courantes sur les façades des demeures françaises. De forme mouvementée, elle est en bois noir. Il est difficile de se prononcer sur la nature réelle du bois employé ici uniquement d’après photo, et les prix varient assez largement entre les productions en ébène et celles en bois moins nobles. Les incrustations de nacre forment un décor assez élégant d’entrelacs et de végétaux stylisés. Le cadran émaillé présente les heures en chiffres romains et est signéE. Souriau à Valençay. Les pendules comme celles-ci sont assez courantes, mais comme nous l’avons vu, leur prix
peut grandement varier. La vôtre, Pierre, semble en très bon état, mais il faudrait pouvoir vérifier de visu son mécanisme,
ainsi que les matériaux utilisés. Avec les éléments dont nous disposons, nous pouvons toutefois imaginer que cette pendule
pourrait trouver amateur aux enchères aux alentours de 150 €. Une somme raisonnable pour égrener les heures avec toute
l’élégance de cette période faste qu’a été le Second Empire.