Ils ont des chapeaux ronds…
Samedi 21 octobre 2023 à 07h
Cette semaine, Alain, de Nouan-le-Fuzelier, soumet à l’expertise de Philippe Rouillac, une paire de tableaux représentant des scènes de vie populaire. L’occasion pour notre commissaire-priseur de nous en dire plus sur l’histoire et la valeur de ces objets.
Vous êtes l’heureux propriétaire, cher Alain, de deux huiles sur panneaux, l’une représentant trois générations d’une famille au coin de l’âtre, une marmite sur le feu, et l’autre représentant deux couples exécutant une joyeuse danse au son d’un biniou. Les tenues traditionnelles portées par les protagonistes sont typiques de Bretagne, peut-être de la région de Pont-Aven. Autres indices quant à la localisation géographique de ces deux scènes : l’utilisation d’un biniou et le lit clos que l’on peut apercevoir à côté de la cheminée. Si ces deux objets ne sont pas spécifiquement bretons, ils sont en revanche très profondément inscrits dans l’imaginaire collectif comme représentant la région.
L’un des panneaux est signé « Homualk ». Charles Homualk, né à Nantes en 1909, traverse le XXe siècle en n'ayant de cesse de représenter les régions, leurs traditions et surtout leurs habitants. Après des études aux Beaux-Arts de la capitale bretonne, gouache, huiles, dessins et bien entendu cartes postales seront les moyens d’expression préférés de Homualk. Il dessine jusqu’à la veille de sa mort en 1996, principalement sa chère Bretagne, mais aussi toutes les autres régions françaises, Pays basque, Alsace, Limousin. Malheureusement, il n’aura pas l’occasion d’assister à l’ouverture le musée de la Carte postale, inauguré l’année de son décès dans le Morbihan et qui lui rendra un hommage bien mérité tant Homualk aura participé à la diffusion d’images à travers tout le pays.
« Que j'aime mon vieux bourg, mon vieux bourg de Bretagne ; Avec sa grève aride et sa rude campagne ; Lui que la grande mer berce de son bruit sourd ; Et qu'endorment les vents » . Ces quelques vers d’Évariste Boulay-Paty, poète romantique du XIXe siècle, résument un attachement nouveau des artistes envers les régions, longtemps délaissées au profit de Paris. Car aux côtés d’autres illustrateurs bretons, comme Mathurin Meheut ou Géo-Fourrier, Homualk s’inscrit dans un mouvement régionaliste plus large amorcé au XIXe siècle. Après la peinture de la condition paysanne, le second Empire va être le terreau fertile, avec le développement du chemin de fer, de la peinture régionaliste. Le XXe siècle verra les grands noms de la peinture représenter également les régions. Aussi bien les expositions, les cartes postales permettent à tous de connaître les us et coutumes des régions les plus reculées de notre magnifique pays.
Charles Homualk a eu une carrière très prolifique. Ses illustrations de la Bretagne étant innombrables, il n’est pas rare d’en trouver sur le marché des ventes aux enchères. Cependant, même si la peinture de Homualk est très sympathique, elle peut, de nos jours paraitre surannée, voire folklorique. Au vu du relatif petit format de vos tableaux (14,5 x 9,8 cm) ainsi que leurs sujets somme toute très classiques dans la représentation régionaliste, ces deux panneaux pourraient trouver amateur aux enchères aux alentours de 40 euros. De quoi vous offrir quelques galettes andouilles et une bolée de cidre pour affronter les premiers frimas !