Garden-Party

Préface du catalogue par Stéphanie des Horts

Garden-Party,

deux mots qui font rêver. Ils tintent comme les cloches d’une église lors d’un mariage à la campagne. Ils portent en eux le chic et la légèreté, la gaité et l’insouciance, il y a des brassées de fleurs, des alcools fins ; un piano retentit dans une pièce, une légère brise se lève, des rires cristallins fusent. Tiens, un mât de cocagne, des rubans et des jeunes filles aux couronnes tressées, ce sont Marie Antoinette et ses dames de compagnie au Petit Trianon.

Zelda Fitzgerald a convié ses amis sur la plage de la Garoupe au Cap d’Antibes. « C’est une Garden-Party » s’écrie-t-elle. Et l’on voit arriver Dali, Picasso et Fernand Léger, Dos Passos et Hemingway. Jackie Kennedy révolutionne la Maison Blanche en donnant les plus belles Garden-Party jamais vues à Washington. Quant à celle du Chapelier fou et du Lièvre de Mars, Alice Liddell et Lewis Carroll en parlent encore. Et que dire du dernier raout des Grantham à Downtown Abbey ? Même Lady Violet ne s’en remet pas.

À Buckingham Palace, toute la bonne société est reçue autour de la reine Victoria et du prince Albert, une manière pour les souverains de se rapprocher du peuple en leur faisant partager leur amour du jardin. La réunion se tient sur la pelouse, on y sert des sandwiches au concombre grands comme des dominos et du thé dans des tasses en Minton. Proust évoquant Albertine, reconnaît : « J'avais cru que c'était frivolité naïve de sa part si toutes nos supplications ne réussissaient pas à la retenir et lui faire manquer une garden-party, une promenade à ânes, un pique-nique. »

Quant à Boni de Castellane, personnage incontournable de la Belle Époque, esthète, collectionneur, dandy, il n’aurait pour rien au monde raté une garden-party. Cela tombe bien, grâce à Rembrandt Bugatti qui sculpta son buste en bronze, Boni de Castellane est aujourd’hui le héros de cette 36ème vente garden-party au château d’Artigny. Envouté par le monde animal, Bugatti passait son temps dans les jardins zoologiques, puisant son inspiration auprès des lions, panthères, léopards et autres jaguars... Un jour, dans un salon parisien, il croise Boni de Castellane. Souple et félin, l’aristocrate a tout du grand fauve cher au cœur de l’artiste, qui décide alors de capturer son allure et modèle un portrait magistral du marquis en tenue de chasse à courre. Une seule ligne suffit au sculpteur pour saisir l’âme du grand seigneur.

En ce jour béni du 26 mai 2024, c’est à Artigny que nous nous retrouvons tous pour la plus célèbre des garden-parties. Il y aura des petits fours, des pains surprises, le meilleur des champagnes et puis Boni de Castellane, Renoir, un coffre en laque du Japon, des dessins d’orfèvrerie réalisés pour Napoléon, une bouteille centenaire de la Romanée Conti et de nombreux trésors, dont seuls les Rouillac ont le secret.

Stéphanie des Horts