DES DESSINS DE GIACOMETTI POUR TRAVAUX PRATIQUES
Vendredi 10 juin 2011
La Nouvelle République, Pascal Denis
Pendant deux mois, des étudiantes tourangelles en histoire de l'art ont expertisé des œuvres exceptionnelles qui seront vendues aux enchères à Cheverny.
C'est l'un des grands rendez-vous du marché de l'art en France. Chaque année, à la veille des vacances, le château de Cheverny accueille la plus grosse vente aux enchères de province. Depuis 1989, l'étude Rouillac y a écoulé quelques trésors et autres curiosités comme un escalier de la Tour Eiffel, un portrait de Georges Washington (vendu 5,5 M€), des oeuvres de Picasso, la collection Barbara ou, plus récemment, le mobilier de l'Orient Express.
Cette année, l'université de Tours sera associée à l'événement qui se déroulera les 26 et 27 juin dans le Loir-et-Cher. Pour la première fois, Philippe et Aymeric Rouillac ont en effet demandé à des étudiants en histoire de l'art d'expertiser quelques-unes des pièces maîtresses qui seront mises aux enchères sous leur marteau. « Cette démarche est fréquente dans les pays anglo-saxons. En revanche, elle est très rare en France », note M e Aymeric Rouillac qui milite pour le décloisonnement entre le monde de l'art et l'université. « Le marché de l'art est un milieu très fermé. Pour la première fois, nos étudiants ont eu l'occasion d'approcher des oeuvres exceptionnelles dans des conditions exceptionnelles », se réjouit Pascale Charron, responsable du département d'histoire de l'art à l'université François-Rabelais.
'' Trésor national ''
Concrètement, neuf étudiantes tourangelles ont travaillé durant deux mois sur un mannequin étrusque en terre cuite du II e siècle, une pendule cage à oiseau du XVIII e (ayant appartenu à la comtesse de Noailles) et une série de vingt dessins d'Alberto Giacometti. Leurs expertises ont permis d'en savoir plus sur l'origine des oeuvres et leur authenticité. « Grâce à leurs recherches, nous savons par exemple que le buste étrusque provenant de la collection tourangelle du Dr Découflé est un chef-d'oeuvre que le Louvre envisage de classer trésor national », indique M e Rouillac. « Cette collaboration démontre que nos étudiants ont un véritable savoir-faire. C'est la preuve que l'université ne forme pas des chômeurs, mais de véritables professionnels », insiste Pascale Charron.
Dans ces conditions, on n'imagine pas que l'expérience ne soit pas reconduite à l'avenir.
Pascal Denis