arts+design #4
Lot 71
Émile-Jacques RUHLMANN (Français, 1879-1933)
Argentier à ressaut, c. 1931-1934.
en placage de palissandre des Indes, la partie centrale à léger ressaut ouvrant par deux portes centrales encadrées de deux rangs de six tiroirs, flanqués de chaque côtés de deux portes dévoilant trois étagères. Socle parallélépipédique en retrait reposant sur une gaine à rouleaux .
Ornementation de bronzes dorés pour les poignées et les entrées de serrure.
Plateau en marbre Portor de forme rectangulaire à gorge.
H. 101, L. 280, P. 74 cm.
(petits sauts de placage).
Provenance:
- collection Félix Marcilhac.
- collection Pierre et Jocelyne Noury, Rennes.
Certificat joint par Félix Marcilhac du 30 janvier 1998:
"uvre authentique (...) réalisée en palissandre, variante du modèle spécialement créé et conçu en bois de violette par l'artiste pour Van Beuningen en 1931, portant le numéro 2136 du référencier d'Émile Jacques Ruhlmann."
Bibliographie:
- Revue Mobilier & Décoration, décembre 1934, uvre reproduite page 453.
- Pierre KJELLBERG, "Le mobilier du XXe siècle, Dictionnaire des créateurs", les éd. de l'amateur, 1994, ce meuble illustré pp. 572-573, "Collection Félix Marcilhac, Paris".
Le décorateur et ensemblier Jacques-Émile Ruhlmann (1879-1933) marque de son empreinte le mouvement Art Déco. Principal instigateur de « lHôtel du collectionneur » en 1925, il est à lorigine dun art total somptueux qui se manifeste lors du Salon international des arts décoratifs de Paris cette même année. Le style Ruhlmann devient le style Art Déco, faisant la part belle aux matériaux luxueux et réinterprétant les styles historiques, entre faste et pureté des lignes. Notre argentier figure parmi les chefs-duvres de sa production. Il est ainsi illustré en pleine page de louvrage de référence consacré par Pierre Kjellberg au mobilier du XXe siècle.
Notre argentier trouve son inspiration dans le mobilier du XVIIIe siècle, comme cest souvent le cas dans les années 1920-1930. Il combine les caractéristiques de deux meubles du règne de Louis XVI: lenfilade, dont il épouse la longueur, et le meuble à hauteur dappui, dont il partage la hauteur. Si les dressoirs dalors ont vocation à étaler la richesses des collections dorfèvrerie de leurs propriétaires, notre meuble dissimule plus quil ne met en scène les métaux précieux. La réinterprétation des fastes du XVIIIe siècle sapprécie alors dans lutilisation de matériaux luxueux pour la confection du meuble lui-même, avec son précieux palissandre des Indes. Son plateau en marbre veiné de pyrite, brillant comme de lor, appartient à un gisement aujourdhui épuisés: le Portor. Cest dans ce même marbre que Rembrandt Bugatti soclait ses plus prestigieuses sculptures.
Toutefois cette beauté régressive ne doit pas nous faire oublier sa fantastique modernité. La plinthe évolue comme une ligne terminée par deux volutes parfaitement sphériques. Elle évoque les « Rythmes » peints par Delaunay et le mouvement orphiste en cette même année 1934. Jusque dans sa serrure, semblable à celles réalisées dautres fois avec Jan et Joel Martel, cet argentier navigue entre luxe et épure. Félix Marcilhac, lun des plus illustres spécialistes de lArt Déco ne sy était pas trompé, ayant été lun des précédents propriétaires de ce meuble exceptionnel par son luxe et ses dimensions.
Sold: 20 000 €