29ème VENTE GARDEN PARTY - I
Lot 82
Attribué à Rosalba CARRIERA (Chioggia, 1675 - Venise, 1757)
Portrait présumé de Watteau de trois-quarts.
Pastel.
Haut. 34, Larg. 26 cm.
(bande de papier rajoutée dans le bas).
Provenance :
- Peut être vente La Live de Jully, Paris, 5 - 16 mars 1770, n° 129 (Portrait de Watteau en buste, on voit le haut d'une chaise sur laquelle il est supposé assis, pastel de 12 pouces sur 10) Acquis 113 livres à cette vente par Rémy.
- Collection tourangelle de Luynes
- Vente Rouillac, Cheverny 10 juin 2007 n°80, puis Vendôme 24 février 2008, n°12.
- Succession Nabon, vente au profit de l'Association diocésaine de Blois.
Attributed to Rosalba CARRIERA. The presumed portrait of Watteau. Pastel. From the former Lalive de Jully estate.
LE PORTRAIT DE WATTEAU PAR ROSALBA CARRIERA DANS LA COLLECTION LA LIVE DE JUILLY
À Paris depuis mai 1720, Rosalba Carriera rencontre Watteau pour la première fois le 21 août de la même année, alors que celui-ci vient de rentrer d'Angleterre. L'admiration de Watteau pour la Vénitienne ne fait aucun doute. On sait en effet qu'il avait manifesté le désir de la rencontrer comme en témoigne la correspondance entre Vleughels et Rosalba, le 20 septembre 1719, il écrivait : " Il y a ici un excellent homme nome Mr Vatteau dont peut être vous avez entendu parler, il souhaitteroit bien vous connoitre [
] et voudroit avoir un petit morceau de vous, il vous envoiroit un de sa main ".
Rosalba mentionne dans son journal qu'elle entreprend le 11 février 1721, pour Crozat, le portrait de Watteau. Elle quitte définitivement la France le 15 mars. Watteau, quant à lui, quitte Paris pour Nogent-sur-Marne où il meurt le 18 juillet à la suite d'une maladie contractée à son retour de Londres.
Notre pastel n'est pas celui que Rosalba Carriera effectue pour Crozat, puisqu'il s'agit de celui conservé à Trieste (Museo di Santa Caterina, inv. P.190) et identifié par Cailleux en 1966. La feuille peut être néanmoins rapprochée d'une étude préparatoire conservée à Francfort (Städelsches Kunstinstitut). Bernadina Sani note que la pose et l'expression ne sont pas caractéristiques du travail de Rosalba Carriera, ce qui pourrait amener à penser qu'il ne s'agit pas d'une étude d'après nature mais d'après des dessins de Watteau lui-même. Notre pastel pourrait donc être un témoignage rare du travail de la pastelliste où elle s'intéresse particulièrement à la physionomie du personnage. Pour Sani, ce pastel et son étude préparatoire sont une réflexion sur les techniques stylistiques de Watteau. Ce dernier rendait en effet compte des sentiments dans son uvre, et Rosalba ici se fait l'interprète de cette nouvelle sensibilité. Nul doute que la Vénitienne fut séduite par Watteau, elle exprime toute sa reconnaissance dans une lettre à Jean de Julienne où elle parle de " l'inimitable Vato ".
La comparaison stylistique avec d'autres portraits de Rosalba daterait ce pastel vers 1720-1721, même s'il ne peut pas être identifié avec certitude comme le portrait de Watteau mentionné par Crozat.
La provenance de ce pastel est prestigieuse puisqu'il apparaît peut-être dans la vente de La Live de Jully en 1770, un des grands amateurs du siècle des Lumières. Il est alors acquis par le marchand Rémy et le portrait disparaît jusque dans les années 1950, où Jacques Wilhelm le redécouvre dans une collection particulière et lui consacre un article dans la Gazette des beaux-arts.
Bibliographie :
- J. Wilhelm, "Le portrait de Watteau par Rosalba Carriera", Gazette des Beaux - Arts n° XLII, Paris, 1953, pp 235 à 246, reproduit fig. 3 ;
- J. Cailleux, "Un portrait de Watteau par Rosalba Carriera", in Miscellanea J. Q. van Regteren, Amsterdam, 1969, pp. 174 à 177 ;
- B. Sani, " Rosalba Carriera ", Turin, 1988, cité sous le n° 143.
- B. Sani, " Rosalba Carriera 1673-1757 : Maestra del pastello nell'Europa ancien régime ", Turin, 2007, p. 166-167, n°161, repr.
Estimation : 15 000 € ~ 20 000 €