LES ENCHÈRES ROUILLAC À ARTIGNY : C'EST L'AMÉRIQUE
Samedi 21 mai 2016
Mag Centre, Frédéric Sabourin
Cette année encore de belles surprises attendent les amateurs d’art et collectionneurs à la vente aux enchères d’Aymeric et Philippe Rouillac, le 13 juin au château d’Artigny (37). Notamment des documents historiques de la Guerre d’Indépendance américaine, qui dormaient au fond d’une malle dans un grenier du Berry...Philippe et Aymeric Rouillac
Les Rouillac se font une fois encore la malle… aux trésors. On se souvient qu’ils avaient déniché, à la faveur d’une expertise en Touraine, un coffre ayant appartenu au cardinal Mazarin en 2013. Les enchères s’étaient envolées bien au-delà de toutes les espérances et tous les qualificatifs (7,3 M€). Cette année, c’est le résultat de neuf ans de négociations et d’études du contenu d’une malle en osier, qui dormait dans un château dans le Berry, qui pourrait bien battre des records. Six plans manuscrits et deux cartes ayant appartenu à Jean-Baptiste Donatien de Vimeur, comte de Rochambeau, qui s’illustra aux côtés de Washington et La Fayette lors de la bataille de Yorktown en octobre 1781, pendant la Guerre d’Indépendance des Etats-Unis d’Amérique.
Des documents inédits – fruit d’une bataille presque aussi âpre que celle qui eut lieu à l’époque – pour les présenter aux enchères. D’abord avec les descendants indirects de Rochambeau : découverts fortuitement en 2007, le reste des papiers, cartes et souvenirs du maréchal vendômois étaient grignotés par les rats et les souris dans le grenier où ils dormaient avant d’être présentés une première fois à Cheverny en 2008. A la suite de quoi le ministère de la Défense revendiqua 66 lots considérés comme « archives publiques » afin de les conserver au Service historique de la Défense au château de Vincennes. Les cartes et plans qui seront vendus aux enchères à Montbazon, au château d’Artigny les 12 et 13 juin prochains ont obtenu leur certificat de sortie du territoire. Pas de risque donc de voir débouler, comme en 2014 avec un pousse-pousse impérial indochinois, un membre d’un musée français pour préempter au dernier moment les précieuses cartes de la bataille de Yorktown.
« Ces cartes montrent trois expéditions terrestres franco-américaine, et trois expéditions navales françaises », expliquent de concert Philippe et Aymeric Rouillac, « la combinaison des deux donnera la victoire, et c’était une première dans l’histoire militaire ». Véritables documents de travail, ces plans sont les premières esquisses levées à vue directement sur le terrain. Ils étaient destinés à reproduire d’autres plans plus soignés destinés à être transmis à l’état-major, au roi et à ses ministres. « On distingue des marques d’usure dans les zones de plis, des froissures, ce qui prouve que ces documents ont été manipulés ». Très certainement par Rochambeau lui-même, et ses aides de camps initiés à la topographie militaire, et des ingénieurs géographes aux armées, issus de la prestigieuse école d’ingénierie de Mézières. Au verso d’un des plans des environs de New-York, une étiquette manuscrite de la main même du comte de Rochambeau, en fine écriture : « Ouvrages et redoutes – Morisiana (continent), îles de New-York, Montrésor et Buchanan – Juillet 1781 – double ». Il est peu probable que ces cartes et plans restent en France, mais reprennent plutôt le chemin des Etats-Unis, friands de tout document « historique ».
La 28e vente aux enchères de l’étude Rouillac présente aussi de très beaux éléments de la collection de Sercey, conservée jusqu’ici dans un château du Morvan, notamment des objets d’art asiatiques, époque Ming, Qianlong, des coupes en néphrite finement sculptées du XVIIIe siècle. Et pour les amateurs de photographies, une nouvelle collection de clichés de Gustave Le Gray (1820-1884), dont on se souvient qu’en 2011, à Cheverny, les Rouillac avaient tapé le marteau sur un record mondial pour les « Bateaux quittant le port du Havre » adjugés 917.000 € (1). Estimées de 4.000 à 60.000 € pour les plus importantes, les « Marines de Normandie et de Méditerranée » atteindront-elles des sommets ? Réponse, avec tout le reste de la vente, dimanche 12 et lundi 13 juin au château d’Artigny, où l’on devrait encore voyager… jusqu’en Amérique.
Frédéric Sabourin
De nouveau mise aux enchères à New-York cette année par Christie’s, la photo n’a cependant pas atteint le record de 2011...