Une « Valse » unique de Camille Claudel aux enchères
Samedi 03 juin 2017
L'Est l'Éclair, Sandra Roger
NOGENT-SUR-SEINE Après cent ans passés dans un placard, une œuvre de Camille Claudel sera en vente au château d’Artigny, en Indre-et-Loire, le dimanche 11 juin.
« La Valse » de Camille Claudel, épreuve en bronze à patine brun-noir, fonte au sable réalisée du vivant de l’artiste vers 1900. Photo Rouillac.
C’est probablement l’œuvre la plus connue et aimée de Camille Claudel. Le dimanche 11 juin, au château d’Artigny, en Indre et- Loire, une vente aux enchères exceptionnelle verra notamment la présentation d’un exemplaire unique de La Valse, remisée au placard pendant un siècle et redécouverte en avril par une famille de l’Oise. Il s’agit d’une épreuve en bronze à patine brun-noir, une fonte au sable réalisée du vivant de l’artiste vers 1900 et signée (sur la terrasse) : « Camille Claudel ». Elle est même accompagnée d’une lettre signée de l’artiste au premier propriétaire de la sculpture Joseph Honoré Allioli.
Préalablement à la vente, l’œuvre de 47 cm de haut a été exposée lors du long week-end de l’Ascension au château de l’Islette, où Camille Claudel et Auguste Rodin se retrouvaient et où le drapé a été ajouté à l’œuvre créée à Paris.
« Cette œuvre a été réalisée à un seul exemplaire et elle a un socle qui est vraiment fantastique. Camille Claudel s’inspire des rochers japonais et on dirait que ce couple danse au bord d’une falaise, au bord d’un précipice. » Aymeric Rouillac, commissaire-priseur
« L’œuvre qui se présente est une œuvre unique. Camille Claudel était engagée avec un marchand qui n’arrivait pas à commercialiser La Valse et, pour vivre, elle a réalisé des versions pirates. On connaît des versions en plâtre. On en connaît une en grès mais les seules qu’on connaissait en bronze jusqu’à présent, c’est une qui est toujours dans la collection de la famille de son frère, Paul Claudel, et une autre qui était dans la collection d’un mécène et qui a été achetée par le musée Rodin en 1963. Toutes les autres œuvres de La Valse qu’on connaît sont des œuvres qui ont été fondues, ensuite, après 1905 quand Camille Claudel a changé de marchand », s’enthousiasme le commissaire-priseur Aymeric Rouillac, en précisant que l’œuvre en vente, à la mort de son propriétaire, « a été jugée indécente et on ne l’a pas revue depuis 1911 ».Si la Ville de Nogent préfère, pour le moment, rester discrète quant à sa participation ou non à la vente aux enchères, on sait que les élus veulent mettre en place une politique d’acquisition dynamique en mobilisant des mécènes en partenariat avec les Amis du musée, et ainsi, être très réactifs lorsqu’une telle opportunité se présente. Dans la salle 13 du musée dédié à l’artiste, sont exposées actuellement quatre exemplaires de La Valse toutes appartenant à la commune depuis leur acquisition, en 2008, auprès de Reine-Marie Paris, petite nièce de l’artiste. Que la Ville se positionne ou non sur l’achat de l’œuvre retrouvée dans l’Oise, il est évident qu’elle compléterait magnifiquement la collection nogentaise.
Estimée à 500 000 € l’œuvre pourrait bien, au vu de sa rareté affoler les enchères et partir au double de de l’estimation dimanche 11 juin.
« Cette œuvre a été réalisée à un seul exemplaire et elle a un socle qui est vraiment fantastique. Camille Claudel s’inspire des rochers japonais et on dirait que ce couple danse au bord d’une falaise, au bord d’un précipice. Ce socle est une pure merveille. Il y a aussi la position des mains qui changent, la position du baiser que l’homme donne dans la base du cou de la femme. C’est toujours plus intéressant pour un musée d’avoir une œuvre unique, plutôt qu’une œuvre qu’on peut voir ailleurs. Mais cela nécessite de la souplesse ou d’avoir des collectionneurs- investisseurs avisés qui se disent “on achète et on en fera don plus tard au musée”. Il y a des collectionneurs en Champagne-Ardenne qui sont capables de dépenser beaucoup d’argent pour cette œuvre C’est peut-être l’intérêt du musée de leur dire : “Aidez-nous, achetez-la et on sait qu’un jour, elle reviendra chez nous” », insiste le commissaire-priseur.DES FONDS DE PENSION AMÉRICAINS INTÉRESSÉS ?
Il évoque aussi le fait qu’un « pool d’entreprises ou de donateurs » locaux pourrait aussi acquérir l’œuvre et bénéficier au passage d’une « superbe opération de communication ». Et le commissaire-priseur d’espérer aussi que le musée puisse se positionner directement.« Ma grande crainte est qu’elle passe 100 ans dans un coffre-fort. Parce qu’aujourd’hui il y a des fonds de pension américains qui disent que Camille Claudel est une valeur sûre. Quand on voit la cote exponentielle de Camille Claudel sur le marché de l’art depuis le film avec Adjani et Depardieu, on sait que si on dépense 100 pour Camille Claudel, on aura 150 dans cinq ans ou dans dix ans. Et je crains que des gens l’achètent comme un actif comme un autre. Ce sont les contacts qu’on a. Et je ne vous cache pas les Asiatiques qui veulent l’emmener au Japon », ajoute Aymeric Rouillac qui sait que l’oeuvre trouvera preneur sans problème et à un prix important. Estimée à 500 000 €, elle pourrait bien, au vu de sa rareté, affoler les enchères et partir au double de l’estimation dimanche 11 juin.
SANDRA ROGER
Plus d’informations sur la vente aux enchères sur www.rouillac.com.
LE TÉMOIN : « C’est très inattendu »
Reine-Marie Paris, petite-nièce de Camille Claudel
« C’est extraordinaire. C’est très inattendu. Mais je pense aussi que, petit à petit, on va retrouver les œuvres disparues. Cela met du temps. Elle est magnifique, splendide et unique. Ça fait plaisir de trouver une œuvre de Camille Claudel qu’on ne connaît pas. On ne sait pas qui est le fondeur mais elle est parfaite et j’aimerais bien que le musée la préempte. On va voir. Je vais aller à la vente mais maintenant elles sont tellement chères. Autrefois, quand je les achetais, personne ne connaissait Camille Claudel. Maintenant, elle fait partie des grands artistes. »