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Un chasseur sachant chasser au rythme des percussions

Samedi 14 décembre 2019 à 07h

Cette semaine, Roger nous fait parvenir la photo du fusil de son grand-père. Me Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, nous donne son avis.



L’objet présenté par Roger est un fusil à canons juxtaposés de calibre 16. Sa crosse est en noyer, sa platine, son chien, sa clef de bascule, ses deux queues de détente et son pontet sont en métal. Son décor est gravé principalement sur les platines de motifs stylisés : on y distingue un escargot.
Nous sommes en présence d’un fusil de chasse, le décor est trop simple pour l’attribuer catégoriquement à une manufacture, toutefois à la fin du XIXe siècle la manufacture d’armes de Saint-Étienne a livré de nombreux modèles similaires. Ces fusils rustiques mais néanmoins fiables ont fait le bonheur de générations de fines gâchettes dans nos forêts giboyeuses.

Calibre, chien, pontet ? Par saint Hubert de quoi parle-t-on ? La description d’un fusil nécessite l’emploi d’un vocabulaire technique sur lequel il faut apporter quelques explications. Le calibre correspond au diamètre interne des canons d’une arme, en l’occurrence le calibre 16 signifie 16,8 mm. Chargé avec des balles ou des grenailles – des billes de plomb contenues dans la cartouche – l’emploi de telle ou telle munition dépend du gibier que l’on traque. Le calibre 16 remplacé aujourd’hui par le calibre 12 était à la fin du XIXe et au début du XXe siècle un standard. Les canons ici côte à côte, sont dits juxtaposés, par opposition à superposés lorsqu’ils sont l’un sur l’autre. L’un et l’autre comptent autant de fanatiques que de détracteurs, il s’agit surtout d’une question de goût… et de mode ! À l’époque de fabrication de notre fusil, les canons étaient presque exclusivement juxtaposés.

Revenons alors sur l’une des caractéristiques de notre arme : son système de mise à feu. L’histoire des armes est indissociable de celles des chiens, cet élément qui lorsqu’on l’actionne éjecte le projectile. Les premiers systèmes à mèche et plus épisodiquement à rouet sont remplacés au milieu du XVIe par la platine à silex. Retenu entre des mâchoires, le silex met feu à la poudre contenu dans la batterie. Il faut attendre le début du XIXe pour qu’un nouveau système périclite son utilisation.
C’est Jean Lepage, un armurier français, qui a l’idée de remplacer l’ancien mécanisme très sensible à l’humidité. La platine à percussion connaît un chien différent, les mâchoires sont remplacées par un embout qui vient frapper l’amorce placée sur la cheminée du canon. Ce choc permet d’enflammer la poudre. Cette révolution est telle que de nombreuses armes plus anciennes sont transformées pour fonctionner avec ce système. Le fusil de Roger, avec ses deux cheminées bien visibles et ses chiens caractéristiques répond à cette appellation de système à percussion.

Avant de connaître l’estimation d’une arme il faut savoir s’il est légal de la détenir. Compte tenu de son âge il est certain que le fusil de Roger est à canon lisse et à un coup par canon. En conséquence s’il date d’avant 1900 il sera de catégorie D s’il est postérieur de catégorie C. La détention d’armes de catégorie D est libre, toutefois une arme de catégorie C ne peut être achetée que par un majeur et doit être déclarée par un titulaire du permis de chasse. Certainement antérieur, ce fusil est vraisemblablement de catégorie D, en vente libre car de collection. On recommandera tout de même de le conserver séparé de ses munitions et démonté, ou dans un coffre destiné à cet usage.
Le fusil présenté par Roger est commun, on pourrait l’estimer autour de 80 euros.
Révisé par un armurier et avec le permis de chasse, il est encore temps d’arpenter les sentiers, d’attendre à l’orée, de courir les bosquets à la recherche d’un faisan bien gras qui régalera votre famille à Noël !
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