La Garden Party des Rouillac
Mercredi 12 août 2020
Arts Magazine, Diane Zorzi en partenariat avec Interenchères
Atelier de Pierre Paul Rubens, Allégorie de saint Georges et le dragon, mis en vente par la maison Rouillac les 4 et 5 octobre 2020 à Montbazon.
Philippe et Aymeric Rouillac à côté du Coffre de Mozarin, Japon, début de l'ère Édo, vers 1640, cèdre du Japon à décor de laque or sur fond noir du Dit du Genji, 63,5 x 144,5 x 73 cm, adjugé à 7,3 millions d'euros par la maison Rouillac en 2013 à Cheverny.
© Kees Von Dongen, Portrait de Madeleine Grey à la rose,1929, huile sur toile signée et datée, 55 x 47 cm, adjugé à 1,16 million d'euros par la maison Rouillac en 2012 à Cheverny.
Les Frères Le Nain, L'enfant Jésus méditant sur les instruments de la Passion, huile sur toile, 72 x 59 cm, adjugé à 3,6 millions d'euros par la maison Rouillac en 2018 à Montbazon.
Depuis quarante ans, les découvertes les plus exceptionnelles rythment le quotidien de la famille Rouillac, une dynastie de commissaires-priseurs installée dans le Val de Loire. Autant d'histoires extraordinaires dévoilées à l'occasion de leur grande vente aux enchères Garden Party annuelle en Touraine.
Depuis 1989, la maison de ventes Rouillac investit chaque année un château du Val de Loire pour y organiser l'un des rendez-vous les plus prestigieux du marché de l'art en France. La 32e édition, initialement prévue en juin, a été décalée les 4 et 5 octobre prochains au château d'Artigny, près de Tours. Riche en découvertes historiques, elle réserve comme chaque année de belles surprises...40 ans de découvertes exceptionnelles
Installée dans le Val de Loire, la famille de commissaires-priseurs Rouillac collectionne depuis quarante ans les découvertes les plus exceptionnelles, à commencer par celle, rocambolesque, d'un coffre de Mazarin, acheté par le Rijkmuseum d'Amsterdam en juin 2013. « Lorsque mon père refuse aimablement un verre de porto après l'inventaire d'un pavillon de la région, son cœur palpite au moment où la propriétaire, écartant la télévision et soulevant un grand drap, sort un vieux cherry du bar. Il découvre un coffre tombé dans l'anonymat, après être passé incognito à travers les siècles pour arriver chez les enfants d'un ingénieur pétrolier », raconte Aymeric Rouillac. Ce meuble monumental, en laque incrusté d'or et de lamelles d'argent, avait été acquis aux enchères par Mazarin en 1658 à Amsterdam, avant de passer entre les mains de Marie-Anne Mancini et William Beckford, puis de disparaître dans l'anonymat de la campagne anglaise pendant la Seconde Guerre mondiale pour, finalement, ressurgir dans le Val de Loire. Adjugé à 7,31 millions d'euros le 9 juin 2013,ce coffre, que ses propriétaires, ignorant sa valeur, avaient baptisé de « coffre à papa », avait été troué de tasseaux de bois pour y entreposer des bouteilles d'alcool. « Un "bar à papa" qui, entre-temps, est devenu le meuble en laque le plus précieux... et le plus cher au monde ! ».C'est encore par des enchères millionnaires que s'achevait l'histoire étonnante d'une gourde impériale servant à ses propriétaires de cendrier, ou celle du Christ méditant des frères Le Nain découvert en 2018 dans une maison sans histoire. « Nous avions été contactés par une septuagénaire vendéenne qui vendait des vieilleries sur Internet et avait un doute sur un tableau offert par sa grand-mère dans les années 1950 », explique Aymeric Rouillac. À l'issue d'un véritable jeu de piste, les commissaires-priseurs et leurs experts du cabinet Turquin reconnaissaient finalement le style de trois peintres majeurs du XVIIe siècle : les frères Le Nain. Quelques mois plus tard, la toile, classée Trésor national par le ministère de la Culture, s'envole à 3,6 millions d'euros.
Une vente annuelle prestigieuse
Ces trésors créent chaque année l'événement à l'occasion de la très médiatisée vente aux enchères Garden Party des Rouillac qui se joue au château d'Artigny à Montbazon, près de Tours. En 2019, les visiteurs pouvaient ainsi découvrir le tout premier dessin que Paul Gauguin réalisa à 17 ans, un bronze de Bugatti de la collection Berheim ou deux panneaux de jeunesse d'Henri Le Sidaner. « La 32e édition, qui se tiendra les 4 et 5 octobre prochains, sera riche en découvertes historiques », annonce Aymeric Rouillac. Plus de deux cents pièces, provenant de collections privées, seront présentées, dont un tableau réalisé par l'atelier de Rubens (estimé à 80.000 euros) et correspondant à la première version d'une Allégorie de saint Georges et le dragon conservée dans les collections royales à Windsor Castle, mais aussi un fragment des Nymphéas de Monet transmis à son jardinier (estimé à 50.000 euros) et un vase chinois en porcelaine (estimé à 400.000 euros) offert pour son anniversaire à l'Empereur Qianlong, qui régna de 1735 à 1796 sur l'Empire du Milieu. « Découvert lors d'une journée d'expertise gratuite à Tours, ce chef-d'œuvre d'émaux Yancai est orné de délicats oiseaux et nous permet d'établir un heureux télescopage spatio-temporel avec cinq des plus beaux livres jamais imprimés en Europe sur les oiseaux et également datés du XVIIIe siècle, estimés de 20.000 à 80.000euros », explique Aymeric Rouillac.Identifié lors d'un inventaire mené dans une demeure bourgeoise en Normandie, un lit sculpté majestueux, dit « lit d'Henri III à Amboise », sera également dévoilé lors de la vente. Cette copie du lit royal, réalisée au XIXe siècle et estimée à plus de 15.000 euros, a rejoint pour l'été le château de l'Islette, à Azay-le-Rideau, où les visiteurs peuvent le découvrir en avant-première. « Pédigrées incroyables, découvertes sensationnelles et chefs d'œuvre seront dévoilés lors de cette vente et, comme depuis 1989, les estimations indicatives pourraient être pulvérisées... ». Car cette vente est non seulement l'occasion pour les collectionneurs, amateurs et curieux de découvrir des objets inédits, perdus depuis des siècles, mais elle les convie aussi à un spectacle enivrant que ce duo de commissaires-priseurs père et fils dirige chaque année avec verve et élégance.