DE BONS AUGURES
Vendredi 19 mars 2021 à 15h
La Gazette Drouot, Caroline Legrand
Chine, époque Qianlong (1736-1795). Petit vase en forme de grenade à quatre faces en porcelaine émaillée polychrome et or des émaux de la famille rose, dits « fencai », au revers de la base, marque Qianlong à six caractères en zhuanshu, h. 20,4 cm. Estimation : 200 000/300 000 €
Provenant d’une collection tourangelle, ce petit vase d’époque Qianlong évoque l’art des ateliers chinois de porcelaine au XVIIIe, et de leurs peintres.
Avec son décor de cailles, symbole de paix, et de pies pour le bonheur, ce vase était le cadeau de mariage idéal !
Il fut offert le 9 octobre 1930 à Jean Richard (1905-1935) et Marie-Louise Thomassin (1906-1990) à l’occasion de leur union en la cathédrale Saint-Louis des Invalides à Paris. Tous deux descendaient d’officiers de l’armée française ; le marié, du général Charles Édouard Richard (1868-1928) et du lieutenant-colonel Charles Lecer (1839-1915), tandis que son épouse était la fille du capitaine Constant-Charles Thomassin (1875-1914). Leur famille tourangelle a ensuite conservé cette pièce.
Présentée sans succès une première fois lors de la Garden Party du château d’Artigny, le 4 octobre dernier, cette porcelaine retente sa chance. Il faut préciser que, depuis, les experts ont localisé un vase des mêmes époque et forme – la fameuse grenade, symbole bouddhiste de prospérité et d’abondance – mais au décor sur fond rose : conservé au Metropolitan Museum de New York (n° 17.120.198), il provient de la collection de M. et Mme Isaac Fletcher.
Notre modèle le surpasse par sa grande complexité iconographique. Il présente en effet sur chaque face un médaillon
rond orné d’un couple de cailles ou de pies sur des rochers fleuris de pivoines, bambous célestes, pruniers en fleur, fleurs de pêcher ou cerisiers en fleur… Ces scènes traitées tels des tableaux renvoient aux origines de la peinture chinoise. Le thème dit « de fleurs et d’oiseaux » évoque en effet la peinture académique de l’époque des Song du Nord, notamment sous le règne de Huizong (1101-1125), qui appréciait particulièrement les sujets naturalistes et poétiques. Quant aux émaux « fencai » de la famille rose, apparus à la fin de règne de Kangxi, ils sont nés de la curiosité des Chinois pour les arts
européens et des échanges entre leurs continents ; le jésuite Jean-Baptiste Gravereau leur fait découvrir le pourpre de Cassius, un composant particulièrement bien maîtrisé par Tang Ying, le directeur des fours impériaux de Jingdezhen, auquel Qianlong accorde toute sa confiance.