Maternité, 1916
Lundi 06 juin 2022
par Auguste Renoir et Richard Guino
Auguste Renoir, Maternité, 1885, Orsay
Pierre-Auguste Renoir (Limoges, 1841-1919, Cagnes-sur-Mer)
et Richard Guino (Gérone, 1890-1973 Antony)
"Maternité", modèle créé en 1916
Plâtre patiné.Haut. 55 cm environ.
(Petites restaurations).
Provenance : succession Renoir, par descendance directe de l'artiste.
Bibliographie :
- Paul Haessaerts, "Renoir Sculpteur", éditions Hermès. Plâtre reproduit planche XXXII, n° 17 : "Madame Renoir assise allaite son fils aîné, Pierre".
- Emmanuelle Héran, "Renoir sculpteur ?", in "Renoir au XXe siècle", Paris, Galeries nationales du Grand Palais, Cat. Ed. Paris RMN, 2009, pp. 70 à 81.
Lors de la vente aux enchères d'un autre plâtre "Maternité" en 2005, le conseil de la Succession Richard Guino nous a précisé que l'éventuelle édition de ce plâtre est limitée aux ayants droit des artistes. Ainsi, cette œuvre est protégée et sa reproduction interdite.
RENOIR ET GUINO SCULPTEURS
Au décès de son épouse Aline en 1915, Renoir imagine un monument funéraire destiné à sa tombe dans le cimetière de Nice. Avec le sculpteur Richard Guino, il réinterprète son chef-d'œuvre de 1885 la représentant allaitant leur fils ainé Pierre (Musée d'Orsay, RF 1998 35). Les deux hommes travaillent à deux sculptures, cette "Maternité" et son "Buste", pendant l'été 1916 à Essoyes puis à Paris. C’est un agrandissement du buste qui sera finalement coulé dans le bronze.
Entre 1913 et 1918, le marchand Ambroise Vollard "trouve des mains" pour Renoir en la personne du jeune sculpteur catalan Richard Guino, qui a auparavant assisté Maillol pour la création des nus monumentaux du Cycle des Saisons. Il n'existe pas de contrat entre Renoir et Guino, mais un accord arrangé par Vollard : le marchand rémunère le sculpteur à la tâche et achète au peintre les œuvres ainsi que le droit de les reproduire. Renoir, gagné par la paralysie, signe avec le manche de son pinceau une plaquette de cire ou d’argile insérée dans la sculpture avant son moulage. Guino tire les plâtres, qui sont transportés à Paris et fondus sous sa supervision pour le compte de Vollard, principalement chez Florentin Godard. Les deux artistes s’attachent d’abord à la création d’un cycle de sculptures d’inspiration mythologique, qui aboutit à la monumentale Vénus Victrix, au haut-relief Jugement de Pâris et au Buste de Pâris. Une pendule, Hymne à la vie, symbolise le passage du temps à travers la figure d’un enfant porté aux nues.
Les portraits en médaillon de Cézanne, Monet, Rodin, Delacroix, Ingres et Corot représentent les artistes compagnons de Renoir ou admirés par le peintre. Enfin, des allégories de l’Eau et du Feu, incarnés à travers Laveuses et Forgerons, magnifient la noblesse des gestes du quotidien, telle la Grande Laveuse (ou Eau), dernière œuvre de cette collaboration.
Notre sculpture, réalisée entre juillet et septembre 1916, n'est pas une commande de Vollard, mais une initiative du peintre, avec le concours du sculpteur, en hommage à son épouse décédée. Après la mort de Renoir, les galeries Flechtheim à Berlin et Barbazanges-Hodebert à Paris éditent, en accord avec sa famille, cette Maternité (Haut. 54 cm). Des tirages en bronze, fondus par Valsuani pour ces marchands, sont notamment conservés à la Tate de Londres (n° inv. N04435, n°10/20) et au musée des Beaux-Arts de Lyon (n° inv. 1974-62). C’est également avec Valsuani que travaille la galerie Bignou, éditrice de bronzes de Renoir à partir du milieu des années 1930. D’autres épreuves seront réalisées par Rudier (Haut. 53,7 cm), ainsi qu’au moins deux en terre cuite ou terre de Saline par d’autres éditeurs (Haut. 50 et 52 cm).
La dernière édition originale de l’œuvre Maternité et de son Étude est réalisée par la succession de Richard Guino dans les années 1980 (Haut. 54 cm et 31 cm). Ce plâtre, qui était demeuré dans la descendance de Renoir, est une découverte de notre vente. Quatre plâtres étaient jusqu'à présent référencés pour cette sculpture : l'un au musée de Perpignan (ancienne collection Bignou, acquis lors de la 33e vente Garden Party, Me Rouillac, château d’Artigny, 6 juin 2021, n° 72, Haut. 54,5 cm), deux au musée Renoir à Cagnes-sur-Mer (provenant de la fonderie Susse et antérieurement de la fonderie Valsuani, déposés par les successions Renoir et Guino, Haut. 56 cm) et le dernier présenté aux enchères aux États-Unis (vente Heritage, « The Unknown Renoir : The Man, The Husband, The Father, The Artist Signature », New York, 19 septembre 2013, Lot 89113, Haut. 55,9 cm).
Aymeric Rouillac
Nous remercions la famille Guino, Madame Anne Demeurisse, ainsi que Mesdames Isabelle Gaétan et Nadège Horner, de la Documentation du musée d'Orsay, pour leurs précisions.