Michel Robillard, l’homme qui touche du bois avec talent et passion

La Renaissance Lochoise, Pascal Audoux

Sa célèbre 2CV en bois, fruit d’un travail de longue haleine, sera vendue aux enchères le dimanche 4juin au château d’Artigny à Montbazon. L’occasion d’une rencontre avec Michel Robillard, un drôle de maquettiste à la passion intacte.

« Bien sûr, je verserai ma petite larme. Mais c’est le dernier chapitre du Tome 1 qui se referme. » C’est en des termes un peu nostalgiques que Michel Robillard, le maquettiste bien connu de Sennevières, évoque la vente aux enchères de son chef d’oeuvre, la 2CV en bois surnommée ”La Belle Lochoise” le dimanche 4 juin à partir de 14 h au château d’Artigny à Montbazon lors de la 35e vente Garden Party des commissaires-priseurs que l’on ne présente plus, Philippe et Aymeric Rouillac. S’il se sépare de ce véhicule unique au monde qui sera d’ailleurs mis à prix à 150 000 €, c’est en raison du décès de son épouse en début d’année. « Cela a fait quatre mois le 19 mai 2023 », soupire-t-il.

Mais lorsqu’on le questionne sur cette fameuse 2CV, l’oeil pétille de nouveau immédiatement. Et on ne peut plus arrêter
cet homme passionné tant il est loquace sur le sujet. « Vous savez, au départ, c’est une Citroën Dyane que j’ai récupérée en 2011, dans les épines et des buissons du côté de Perrusson », révèle ce natif de Blois, originaire de Villemardy dans le Vendômois qui exerça toutes sortes de métiers, groom, scieur, ouvrier métallurgiste, charpentier et menuisier avant de devenir officiellement maquettiste il y a vingt six ans. « Je voulais construire, depuis un certain temps déjà, par simple passion, cette voiture emblématique, une 2CV en bois à l’échelle 1 (modèle de 1955 avec les portes dites ”suicide” NDLR). Et le châssis de la Dyane s’y prêtait parfaitement. »

« Cinq essences de bois fruitiers »

L’artiste détaille la réalisation de ce véhicule que nombre de générations ont côtoyé au quotidien entre 1948 et 1990. « Cinq essences de bois fruitiers ont servi à sa construction. II y a d’abord le noyer pour les ailes avant et arrière, le poirier pour l’ossature, le pommier pour les pièces de carrosserie, le merisier pour le coffre arrière. »
Notre homme a poussé le « vice » jusqu’à fabriquer le tableau de bord en loupe d’orme, « une essence précieuse aujourd’hui disparue », tient-il à rappeler. « J’ai gardé la colonne de direction en fer. » Mais celle ci a été « maquillée » de telle façon qu’on a l’impression qu’elle est en bois !

Pour l’intérieur de la 2CV, « j’ai conservé l’ossature en fer sur laquelle j’ai installé des lames de poirier », explique-t-il. Pour arriver à conserver fidèlement les formes arrondies de cette fameuse Citroën, le maquettiste a coupé dans la masse. Michel Robillard a mis près de six ans pour peaufiner ce modèle unique au monde. « II pèse exactement 600 kilos, pas un de plus ou de moins, soit seulement quinze de plus que le modèle d’origine lorsque je l’ai placé sur la balance du côté de Verneuil-sur-Indre. » Seule pièce extérieure qui ne soit pas en bois, c'est la capote, en alpaga s’il vous plaît !

« Les gens ont trouvé ça génial !»

Dès son inauguration le 23 septembre 2017 lors d’un salon à Salbris (Loir-et-Cher), ce fut immédiatement l’engouement. « Les gens ont trouvé ça génial », concède-t-il presque en s’excusant d’avoir porté sur les fonts baptismaux un tel chef
d’oeuvre ! La 2CV a montré ses charmes à 155 reprises lors d’expositions diverses et variés de France et de Navarre. En 2004, histoire de reconnaître son immense talent, on lui a décerné la Médaille d’Or au Mondial de la maquette en 2004
à Paris.

Mais il faut dire que Michel Robillard n’en est pas à son coup d’essai et qu’il a déjà pas mal de véhicules réalisés, au 1/10e notamment. « J’ai fait une Traction, une Mercedes SSK, une Bugatti Royale, un Taxi de la Marne, une Lincoln, une Bianchi », lance-t-il avec une certaine fierté en montrant ces créations dans l’atelier où se trouvé quoi vous savez. II a même réalisé la Ferrari avec laquelle Michael Schumacher a conquis son ultime titre de champion du monde en Formule 1 !
Et consécration ultime, elle sera exposée au musée de la marque au cheval cabré à Maranello en Italie !

Et maintenant un DS Coupé en bois !

En préambule de notre entretien, l’artiste du Lochois évoque la fin du « tome 1 ». Cela signifie qu’il existe sans doute un tome 2 et plus si affinités. « La suite c’est l’utilitaire Citroën HY que j’ai ensuite fabriqué en hommage à Louis la Brocante joué en son temps par l'acteur Victor Lanoux. » Et jamais deux sans trois pour cet insatiable créateur qui est en train de construire patiemment, en bois toujours, une Citroën DS coupé Chaperon. « Je l’ai trouvée en Belgique grâce à un de mes contacts. Elle a été sablée. J’ai passé de l’anti-rouille », précise-t-il. Pour le moment, seul le pare-chocs est en bois. Mais le reste suivra. Ce sera le dernier défi dans nos contrées pour Michel Robillard. « D’ici deux ans je rejoindrai deux de mes fils qui vivent dans le Var, à Draguignan. L’un d’eux est designer dans le bois. » Les chiens ne font pas des chats. Et il ajoute à dessein sur le ton de la plaisanterie : « Comme ça je pourrai me rendre plus souvent à Maranello ! » On sait pourquoi...