Portrait japonais de moine bouddhiste
Mercredi 02 juin 2021
La Gazette Drouot, Caroline Legrand
Sculptée dans le cyprès, cette tête de religieux témoigne de l’originalité et du réalisme de l’art japonais à l’époque Kamakura.
Si l’époque Kamakura est marquée au Japon par la prise de pouvoir en 1185 de Yoritomo et l’instauration d’un gouvernement militaire, les arts vécurent néanmoins durant plus d’un siècle une belle période de renouveau. Avec la volonté de reconstruire les temples bouddhistes détruits de Nara, le shogun envoie des moines en Chine, dirigés par Shunjobo Chogen, afin de trouver de nouvelles idées architecturales, mais aussi des artistes pour travailler à ce vaste projet. Spirituellement, cette époque connut également la diffusion de nouvelles doctrines bouddhistes plus populaires, la Terre pure et le zen. Les artistes, et notamment les sculpteurs, furent donc mis à pied d’œuvre dès la fin du XIIe siècle pour renouveler les images de culte. Si l’art japonais est alors encore influencé par la Chine des Song, il prend également son indépendance en revenant à un style très réaliste, propre à l’époque de Nara. Créée essentiellement par l’importante école Kei, la statuaire nippone connaît alors une période florissante, avec des pièces toujours plus complexes, tant pour les drapés que pour les coiffures. Ce réalisme est également rendu possible grâce à une technique bien particulière, utilisée pour cette tête de moine, celle de l’assemblage en « warihagi zukuri ». Le bois ayant la faveur des artistes à cette époque, celle-ci permet de réaliser des œuvres de plus en plus grandes, le moins lourdes possible et également résistantes (les blocs de bois ayant tendance à se fissurer sous l'effet de l’humidité). Les sculpteurs divisent ainsi le bloc en plusieurs parties, taillant en creux chaque élément pour ensuite remonter l’ensemble. Avec son front ridé et ses yeux — incrustés de cristal de roche — mi-clos, cette tête de moine était utilisée lors de processions, placée au sommet d’étendards. Durant des centaines d’années, ces œuvres ont été précieusement conservées au sein du trésor des temples.
La seconde journée de cette Garden Party proposera le 7 juin des meubles, des bijoux ainsi que des objets d'art et de collection variés. Se côtoieront ainsi en tête d'affiche une bague en platine ornée d'un diamant rond de taille brillant de 4,28 ct, de couleur KL et pureté SI1, entre six diamants rectangle, issue d'un travail français vers 1930 (12 000/16 000 €), et une tête de moine bouddhiste produite au XIIIe siècle au Japon, sculptée dans le bois de cyprès et laquée beige (8 000/12 000 €). On ne manquera pas ensuite le portrait sculpté présumé de Jean de la Barre, seigneur de Véretz et comte d'Étampes, par un artiste de l'école tourangelle du premier tiers du XVIe siècle, en pierre calcaire et panache en bois avec traces de polychromie (même estimation). Signalons ensuite aux cimaises la présence d'un Paysage à la cascade peint sur cuivre au début du XVIIe par l'Anversois Martin Ryckaert (8 000/10 000 €), et pour l'archéologie celle d'un casque chalcidien en alliage cuivreux provenant de la Grèce de la fin du Ve ou du début du IVe siècle av. J.-C. (6 000/8 000 €).